Le 11 janvier, le président de la République lançait une stratégie nationale de lutte contre l’endométriose, maladie de l’appareil génital féminin qui touche une femme sur dix. Les différentes annonces doivent faciliter le parcours de soins, supprimer l’errance médicale, ou financer la recherche et « donnent beaucoup d’espoir » selon Yasmine Candau, présidente de l’association EndoFrance, atteinte de cette maladie.
Le Président de la République a dit que l’endométriose est “un problème de société, et non un problème de femmes”. Ces mots vous ont-ils touchée ?
Totalement. Ces mots ont été très émouvants. On a reçu beaucoup de messages de femmes qui étaient émues d’entendre le Président parler de notre maladie. Beaucoup ont l’impression d’être enfin reconnues dans leur souffrance. Il y a eu de la réjouissance et un grand soulagement. Il était temps d’agir. Encore aujourd’hui, des présidentes d’associations européennes nous félicitent. Elles souhaitent que la même chose soit faite chez elles. Ce discours est une reconnaissance morale pour les femmes.
Le plan du Gouvernement prévoit d’investir dans la recherche contre la maladie. Cette perspective vous redonne t-elle espoir ?
Toutes les annonces vont dans le bon sens et donnent beaucoup d’espoir. On sait que ça prendra du temps. La prise de conscience arrive déjà tardivement, donc mettre les choses en œuvre prendra du temps. Mais soyons optimiste: il y a enfin une prise de conscience sur la nécessité d’agir. La recherche est un point important car tant que les origines de cette pathologie ne seront pas comprises, elle sera toujours difficilement diagnostiquée.
Lorsque l’on est atteinte d’endométriose, quels sont les problèmes posés par le parcours de soins ?
C’est ce que l’on appelle l’errance médicale. Aller d’un médecin à un autre sans vraiment savoir quoi faire. Une femme touchée par cette maladie est souvent livrée à elle même. Le travail de nos bénévoles consiste à aider ces personnes qui ne savent plus où aller et qui sont à bout de souffle dans leur prise en charge. Le plan gouvernemental prévoit justement de travailler sur ce problème, avec la mise en place des filières de soins par région. Le but sera de flécher le parcours de soins. Grâce à cela, les équipes qui travaillent sur l’endométriose seront mieux visibles par les patientes, médecins généralistes, sages-femmes, et gynécologues de villes.
Depuis sa création en 2001, comment votre association EndoFrance a-t-elle évolué ?
En vingt ans, elle a surtout évolué par rapport au nombre de bénévoles et d’adhérents. En juin 2021, nous avions 120 bénévoles et 2650 adhérents à jour de cotisation, répartis sur toute la France. Les missions restent les suivantes: soutenir, informer, agir. Soutenir les personnes atteintes d’endométriose et leur entourage, informer le grand public sur la maladie, et agir auprès des pouvoirs publics et des professionnels de santé pour améliorer le parcours de soin des personnes atteintes d’endométriose. L’année dernière, nos bénévoles ont réalisé plus de trois-cent actions, en visioconférence, certes, avec le contexte de crise sanitaire. Le but est de continuer à échanger avec les couples et les femmes atteintes. Informer le public par des conférences et des tables rondes avec des professionnels de santé pour apporter des informations fiables. L’association a aussi beaucoup agi avec les équipes ministérielles pour faire des préconisations afin d’élaborer la stratégie nationale annoncée par Emmanuel Macron.
Votre association travaille-t-elle en réseau avec d’autres organismes similaires comme ENDOmind ou Info Endométriose ?
Nous avons travaillé avec ces associations auprès des équipes ministérielles. Chacune apporte son point de vue et son positionnement. Chez EndoFrance, nous sommes vraiment au contact des patientes avec la mission de les soutenir. L’année dernière, nous avons répondu à près de 50 000 mails pour mener une action de terrain et de proximité. Ce n’est pas forcément le cas d’ENDOmind qui agit plus avec une fonction lobbying aux côtés des parlementaires. On se complète et on essaie de travailler main dans la main pour la même cause.
La marraine d’EndoFrance est l’actrice Laetitia Milot mais l’association a également un parrain, Thomas Ramos, joueur de rugby professionnel au Stade Toulousain. Est-il important pour vous d’impliquer les hommes pour mieux sensibiliser ?
Bien sûr ! Lors des premières réunions faites par EndoFrance, c’était du 100% féminin. Petit à petit, on a vu arriver un conjoint, un papa, un frère, un ami qui viennent chercher l’information et essayer de comprendre la maladie. Ils accompagnent surtout un être cher dans son combat quotidien. C’est ce qu’a fait Thomas Ramos lorsqu’il nous a contactés pour nous expliquer que sa future femme était atteinte d’endométriose et que c’était compliqué au quotidien. Lui et sa compagne ne savaient pas vers quoi ils allaient. Son ambition est de changer le regard des hommes sur cette maladie, et montrer qu’ils ont un rôle à jouer pour mieux accompagner. Thomas Ramos nous aide à sensibiliser le monde du sport, qui est un milieu que l’on ne toucherait pas forcément sans lui.
Quelles sont les prochaines perspectives pour votre association ?
Avoir plein de nouvelles bénévoles ! (rires) On a besoin de soutien dans toutes les régions pour répondre à la demande face à une maladie qui touche une femme sur dix. Ça représente beaucoup de travail d’agir quotidiennement pour soutenir les autres, sachant que nous sommes nous-mêmes atteintes d’endométriose. Le comité de pilotage national fera avancer les choses dans le bon sens. Nous allons y veiller.