Candidat sous l’étiquette du Nouveau Front Populaire, Raphaël Pitti prospecte sur le marché de Clichy. Photo : © Mathilde Gay
Parachuté dans les Hauts-de-Seine sous la bannière de l’Union des gauches, Raphaël Pitti se lance à l’assaut d’une circonscription acquise au camp présidentiel et d’un territoire indissociable de la droite. Portrait de ce candidat atypique, débarqué de Lorraine pour conquérir cette 5e circonscription.
Il nous a donné rendez-vous à l’école Senghor à Clichy mais aurait pu se trouver au Kurdistan ou en Syrie. À 74 ans, les combats de Raphaël Pitti sont indissociables de son métier de médecin de guerre. Cet anesthésiste-réanimateur est intervenu dans de nombreux pays minés par la guerre et les crises humanitaires.
“Ta vie est une œuvre, commente la députée européenne, Chloé Ridel, lors d’un meeting politique du Nouveau Front Populaire, organisé à trois jours du premier scrutin. De par ta profession, tu as sauvé des gens en Yougoslavie, en Ukraine et en Syrie”. Un parcours de vie également salué par Baptiste Nouguier, conseiller municipal PS à la mairie de Levallois-Perret. « C’est quelqu’un au-dessus de la mêlée qui a écumé de nombreux territoires de guerre toujours très compliqués”.
Médecin humanitaire engagé
Son premier combat ? “Gaza”, affirme l’intéressé au moment de prendre la parole devant une assemblée de militants. Depuis l’attaque du 7 octobre 2023, il est l’un des rares Occidentaux à s’être rendu à deux reprises dans l’enclave palestinienne. Sur place, le candidat a “vu les atrocités” de la guerre et “une population totalement désœuvrée”. Dès son retour, il a plaidé dans les médias français pour un cessez-le-feu immédiat.
À l’échelle locale, il a également poursuivi cet objectif en tant que conseiller municipal d’opposition (EELV) à Metz, chargé de l’accueil et l’intégration des réfugiés. Cette commune, dirigée par la droite républicaine, s’est officiellement engagée à accueillir des réfugiés palestiniens le 29 mai dernier, après l’avoir fait pour des réfugiés ukrainiens il y a quelques années.
Pourtant, plus de 300 kilomètres séparent la Lorraine des Hauts-de-Seine. “Je me suis senti adopté par cette circonscription alors que je viens de Moselle”, confie le candidat avant de remercier les habitants.
Inconnu dans la circonscription
Mais comment expliquer sa présence en région parisienne ? “Au lendemain des européennes, je sortais de manifestation à Brest quand Raphaël Glucksmann m’a appelé, raconte le sympathisant Place Publique. Il m’a demandé si je voulais bien être candidat dans ces deux villes (Clichy et Levallois-Perret, ndlr) aux sociologies différentes et où d’anciens socialistes et électeurs déçus de Macron pourraient revenir vers nous”.
Raphaël Pitti accepte. Il choisit Emma Gilibert comme suppléante. Cinquante ans les séparent. “On forme un binôme complémentaire, assure l’étudiante de 23 ans, car on incarne cette grande union.” “L’avenir appartient aux jeunes”, renchérit le candidat.
Étranger aux problématiques locales jusqu’à il y a encore deux semaines, il a depuis travaillé ses sujets. Sur l’hôpital Beaujon de Clichy menacé de fermeture par l’État : “celui-ci doit rester un hôpital de proximité”. L’élu messin a d’ores et déjà rencontré les syndicalistes de cet établissement de santé pour en connaître les enjeux. Autre ordre de bataille à l’échelle territoriale : la “végétalisation” des espaces urbains et la “lutte contre la bétonisation”.
Des militants séduits
Que pensent les électeurs de cet inconnu politique ? Dans la salle de sport où se tient la réunion publique, les applaudissements vont bon train et les 80 chaises disposées à l’avance n’ont pas suffi à accueillir la centaine de personnes qui s’est déplacée. « Je préfère un candidat parachuté plutôt qu’un imposteur local« , s’exclame Camille, 23 ans, qui connaissait Raphaël Pitti de notoriété de médecin. Claude lui, reconnaît avoir dû faire des recherches pour “se documenter” et savoir pour qui il allait voter.
Aux derniers rangs, un visage connu du grand public ne rate pas une occasion pour ovationner le candidat. L’acteur Yvan Le Bolloc’h est venu exprès pour lui alors qu’il ne vote pas dans le département. ”C’est quelqu’un de fantastique, le meilleur candidat de Place publique, estime-il. Il a un discours politique structuré, offensif, percutant et il ne vient pas de ce monde de politiciens”.
Rien pourtant n’est joué dans cette 5e circonscription des Hauts-de-Seine. Bastion de la majorité présidentielle depuis deux mandats législatifs, Raphaël Pitti va tenter d’imposer la gauche dans un paysage politique saturé par quatre listes de droite.