Presse jeunesse: 70% des enfants lisent des magazines en France
Parmi les 15 millions de jeunes français, 70% d’entre eux lisent des journaux ou des magazines, que ça soit à l’école, en vacances ou de manière régulière à la maison. En parallèle, le gouvernement a déjà commencé à mettre en œuvre son projet d’école numérique tandis que le quotidien Libération a lancé une nouvelle version digitale destinée à un jeune public avec le P’tit Libé. Le tout numérique est-il alors l’avenir de la presse jeunesse ?
Les quotidiens : une exception française
Okapi, Géo ado, Sciences et vie Junior… La presse jeunesse est un des rares secteurs de la presse qui marche bien en France avec ses quelques 10 millions de lecteurs plus ou moins réguliers. Peu de groupes de presse se partagent le marché. L’un d’entre eux s’est même démarqué en se spécialisant dans le journal quotidien. Ainsi le groupe Playbac a créé trois quotidiens visant un public de 6 à 17 ans, ce qui fait de la France le seul pays à proposer ce format aux enfants.
Néanmoins ce marché est aussi impacté par la crise. Dans un but d’économie, certains parents vont préférer résilier leurs abonnements pour favoriser les biens de première nécessité.
Paradoxalement on constate que ces abonnements, considérés comme non indispensables, vont être gardés le plus longtemps possible. En effet, les journaux et magazines restent toujours un élément primordial dans une vie familiale où les parents n’ont pas beaucoup de temps à consacrer à leurs enfants , le rythme métro-boulot-dodo prenant 80% de leur journée. Ainsi la petite histoire du soir reste la clé d’un bon câlin pour une mère ou un père et leurs bambins. Une version numérique aurait-elle autant de succès ?
Pour Eglantine, mère de deux très jeunes lecteurs, la réponse est non. « Avec les journaux papiers, ils peuvent toucher les pages et réclamer eux mêmes l’histoire qu’ils souhaitent. Avec un journal numérique ça ne serait pas possible, car ils ne vont pas allumer l’ordinateur d’eux mêmes et puis c’est compliqué de tomber par hasard sur une histoire qu’ils ont envie de relire ou reécouter ».
Pourtant pour cette génération internet, le numérique est devenu un réflexe. « Beaucoup de très jeunes enfants, quand ils ont une image imprimée devant eux, essayent de l’agrandir avec leurs doigts, comme sur une tablette ! » déclare Victoire, enseignante dans une école primaire parisienne. Avec la diffusion des smartphones et des tablettes, chaque enfant a déjà eu l’occasion de manipuler au moins une fois un de ces engins. Occasion qui est en passe de devenir une habitude avec le projet de loi de l’Education Nationale, qui insiste sur l’utilisation du numérique à l’école. Ainsi certains collèges-lycées n’utilisent plus de manuel, mais seulement des tablettes, tandis que certaines écoles primaires ont également des tablettes à destination des élèves.
« Le numérique n’est pas un grand Eldorado pour la presse jeunesse »
Malgré cette tendance, une étude faite par Playbac montre que les enfants n’assimilent pas la lecture aux écrans. Les tablettes, smartphones ou encore ordinateurs vont leur servir à regarder des films, faire des recherches pour des exposés, aller sur des réseaux sociaux ou encore jouer à des jeux, mais pour ce qui est de lire des histoires ou des articles, ils vont se tourner vers les versions papier. « L’enfant a besoin de s’approprier le magazine en le feuilletant » constate Eglantine « Et je n’aime pas trop le côté numérique. Ca a un côté lobotomisant. (…) je préfère transmettre à mes enfants une utilisation traditionnelle de la presse. »
La presse jeunesse investit de plus en plus sur internet. Bayard Press, Milan Press ou encore Playbac possèdent un site internet qui propose une rubrique numérique. « Elle ne veut pas être rétrograde ou passéiste en ne restant que sur papier. » explique Sarah Benlolo, journaliste à La correspondance de la presse.
« Néanmoins l’offre ne séduit pas encore.(…) Il s’agit surtout pour les groupes de presse jeunesse d’y déposer leur marque et de la vendre. » Ainsi, les groupes de presse tel que Bayard Press proposent des jeux ou des activités ludiques sur leur site internet pour pouvoir se faire connaître par le plus grand nombre.
La présence des groupes de presse jeunesse est de plus en plus visible sur internet, mais l’investissement financier reste encore faible. Internet reste avant tout un complément de cette presse qui a encore de beaux jours devant elle.
Laure Blachier