Les outils numériques gouvernementaux au service de la loi Design de la plateforme République numérique
26 septembre 2015, Manuel Valls et Axelle Lemaire, secrétaire d’État au numérique présentent les grandes lignes du projet de loi « pour une République numérique » divisé en trois volets : ouverture des données publiques, service public de la donnée et données d’intérêt général. Ils lancent dans le même temps une consultation participative « République numérique » : durant trois semaines les citoyens sont invités à modifier ou commenter en ligne ce texte de loi. Une partie de leurs contributions sont prises en compte dans la version finale du texte qui est soumise au débat parlementaire le 26 janvier suivant, pour être définitivement adopté le 8 octobre 2016. Sur la forme, cette consultation marque une rupture importante avec les projets antérieurs d’e-gouvernement proposés en France, aussi bien en termes de design de la plateforme consultative (nouvelles formes de collaboration autour de l’écriture d’un texte législatif), d’usages (31 000 participants actifs, 8 500 contributions et 147 000 votes) que d’impacts sur la décision (5 articles nouveaux directement inspirés par les propositions des internautes et 90 modifications aux articles du projet de loi initial). L’objet de cette recherche est d’analyser comment a opéré cette plate-forme de débat créée par le cabinet d’Axelle Lemaire par le prestataire Cap Collectif en se demandant quel type de dispositif participatif se met en place, avec quelles hypothèses et quelles modalités. Comme l’a montré Dominique Cardon directeur du Médialab de Sciences Po, Internet a permis de multiplier et de diversifier les dispositifs de débat et de consultation de la chose publique. Avec sa plateforme en ligne, la consultation République numérique va à l’encontre des visions traditionnelles de manufacture de la loi. Elle marque une rupture avec les consultations antérieures. Même si les consultations publiques ne sont pas totalement nouvelles dans le paysage politique français, celle-ci est notable par le dispositif législatif mis en œuvre au service du renforcement de l’exercice de la citoyenneté et de l’augmentation du pouvoir d’agir des citoyens sur la loi. (empowerment). Dès lors, on se penchera sur une analyse du design de la plateforme en s’intéressant aux acteurs appelés à participer et à la place que le dispositif leur attribue. Comment sont-ils équipés pour participer et comment leurs contributions sont-elles rendues visibles sur la plate-forme ? Comment celle-ci organise-t-elle le dialogue entre les participants et les responsables de la consultation ? Mais également à la réception de la proposition de ce dispositif inédit auprès des administrations et des différents contributeurs (élus, citoyens). En quoi cette consultation va-t-elle, éventuellement, à l’encontre des visions traditionnelles de la production de la loi ? Et plus spécifiquement, comment parvient-on à rendre opératoire, un mode d’action et de construction de l’action publique qui contredit à la fois les façons de travailler de l’administration et celles des politiques ? Nous dresserons également une cartographie des débats sur la plateforme à partir des contributeurs les plus actifs. Comment interviennent-ils sur la plateforme ? Comment s’articulent les points de débats ? Peut-on dresser une typologie des participants sur ce type de plateformes en ligne ? C’est donc le dispositif socio-technique que nous interrogeons tout au long de ce travail en adoptant des méthodologies issues des SHS (entretiens, analyse médias, analyse design) et en questionnant le rapport entre outil, équipement, design et réception dans le processus long de manufacture de la loi.Sélectionner une page